mercredi 3 novembre 2010

" marché de Noailles "

Voilla l'equipe ,on commence notre projet ethno ,vous voulez travailler sur " marché de Noailles " d'ccord Michel ,Thibaut ,Nathalie.
        Retrace historique sur le marché Noaille

Noailles, premier arrondissement marseillais. Tracés anciens et rues sinueuses, immeubles parfois dégradés. Ce petit quartier qui était décrit comme «populeux, populaire, le plus commercial de Marseille » s'est progressivement fané. Les années 1970 ont vu les commerçants d'antan partir un à un. Bottiers, tripiers, liquoristes et corsetiers ont pris leur retraite. Malgré la position centrale du quartier, les fermetures de fonds se multiplient, et les valeurs foncières trébuchent. Dès le début des années 1980, un renouveau commercial s'opère : de nouveaux acteurs s'installent dans les espaces laissés vacants, modifiant l'inscription migratoire du quartier. Les commerçants d'origines maghrébine et orientale s'implantent, en forte majorité. Ils côtoient les Européens toujours présents et quelques rares, mais remarqués, commerçants venus d'Asie. Des établissements tenus par des entrepreneurs subsahariens s'ouvrent progressivement, regroupés sur quelques rues centrales du quartier. C'est sur eux que mon attention a été attirée. Nulle part ailleurs, ni dans la ville ni dans la région, on ne trouve un tel agencement commercial, une telle concentration d'entrepreneurs subsahariens. L'attrait sur la clientèle africaine, pourtant très dispersée, est important. «Chacun de nous va à Noailles, ne serait-ce que pour y trouver les produits indispensables comme les produits des cheveux, mais c'est aussi pour rencontrer les autres, parler, avoir des nouvelles. Même moi je vais à Noailles pour acheter les produits dont j'ai du mal à me passer, et là-bas je croise forcément des connaissances, des fois par hasard, ou des fois sur rendez-vous ”, explique un client camerounais, cadre supérieur.

Par cette particularité, Noailles devient «le marché africain », avec son sautoir de dix, vingt, actuellement quarante boutiques, toujours en maturation. Et l'on trouve de tout dans ce marché. Le gérant de l'épicerie subsaharienne se vente d'avoir «les condiments de l'ensemble de l'Afrique, d'Est au Sud, du Nord à l'Ouest ». La dizaine de restaurateurs s'organise pour proposer des spécialités diversifiées. Vendeurs de tissus et d'objets artisanaux, commerçants de musique, tailleurs, coiffeurs, multiplient une offre moins exotique que culturelle et «existentielle ». Et l'on défie quiconque de ne pas trouver dans la quinzaine de boutiques de cosmétique les mèches à tresser qui lui conviennent exactement... frisées, raides, épaisses ou fines, couleurs n° 1 à 32 dans cette marque, n° 0 à 40 dans cette autre... Un panel qu'aucune boutique, prise isolément, n'est en mesure de proposer. Voilà donc un espace urbain qui a reçu la patte de ces entrepreneurs d'un autre continent. Ils ont su enrichir l'identité de ce quartier assez malléable, s'organiser, structurer un approvisionnement et une diffusion de produits et de services, être représentés dans la ville...

Dans le même temps, pourtant, un mouvement contraire s'exécute à Belsunce, ce quartier entre port et gare et qui a offert l'hospitalité à bien des migrants venus dans la ville. Des ressortissants de la Vallée du Fleuve Sénégal y tenaient, depuis les années 1950 surtout, des établissements commerciaux. Mais ils ferment les uns après les autres, appuyés, c'est vrai, par la réhabilitation. Cependant, personne n'est prêt, de toute façon, à assurer la relève des «vieux » qui incarnent une première «génération » de commerçants subsahariens de Marseille. Celle-ci est représentée par des hommes surtout - anciens militaires, marins reconvertis, dockers retraités ou chômeurs – qui ont progressivement investi leur capital dans des petits entreprises commerciales
[1]. Ensemble, ils ont formé une organisation commerciale masculine, fortement inscrite dans l'Islam et référée à la confrérie mouride. Oligarchique, resserrée sur une appartenance partagée, cet agencement a cependant été placé sous la tutelle du puissant dispositif maghrébin décrit par Alain Tarrius[2]. Pourtant cette formation commerciale subsaharienne se délite à partir des années 1980 : le départ des plus âgés est aggravé par le détachement des plus jeunes qui prennent leur distance et tentent de multiplier leurs ancrages[3]. Très peu réclameront une filiation et une succession commerciale. Falla, jeune commerçant mouride quitte Belsunce où il était employé et s'installe à Noailles, à deux pas de la nouvelle salle de prière de la confrérie. Cependant, il n'entretient avec son groupe religieux que les contacts nécessaires pour «garder les liens », et sans lui vouer son entreprise.

Car le contemporain des jeunes entrepreneurs subsahariens prend place ailleurs : à Noailles, de l'autre côté de la Canebière. Ce quartier actualise avec ponctualité l'événement migratoire national tel qu'il se dessine depuis le début des années 1980. Il incarne – à son échelle – les nouvelles circulations de l'Afrique subsaharienne vers la France marquées par un éclatement et un renversement des tendances
[4]. Les nouveaux commerçants qui s'installent à Noailles représentent l'ensemble du vaste territoire situé au sud du Sahara. Et ce sont des femmes, beaucoup. Leur présence est survisibilisée dans ces boutiques de Noailles et l'on peut estimer à 80 % les acteurs féminins qui y interviennent. Mais il s'agit également de personnes jeunes, âgées d'une trentaine d'années. De l'un ou de l'autre sexe, ils ont vécu, un moment au moins, dans les grandes capitales africaines. Les petits points que forment ces acteurs sur la carte commerciale du quartier revendiquent presque autant de villes : Bangui, Brazzaville, Ouagadougou, Lagos, Douala, Yaoundé, Bamako, Lomé, Cotonou, Dakar, Abidjan... autant de langues, de religions, de cultures... et de croisement d'itinéraires singuliers. Mais tous se disent compatriotes. Cette composante, qui respecte la photographie tirée des statistiques migratoires, s'en éloigne pourtant sur un point : ces jeunes adultes ont été, pour la plupart, déscolarisés assez tôt et ne peuvent revendiquer d'acquis professionnels valides en France. Les démarches administratives, institutionnelles et comptables exigées par leur entreprise n'en sont que plus contraignantes... et soldent de nombreuses cessations. Cette première fragilité contribue au turn-over important d'acteurs, de fonds, de partenaires et d'itinéraires commerciaux qui traversent successivement ces boutiques, rebondissent d'un établissement et d'une activité à l'autre.

Ces nouveaux entrepreneurs, malgré leurs disparités, convergent vers un objectif qui marque une rupture avec la génération précédente et les éloigne du système fortement hiérarchisé rencontré à Belsunce. Ils ont, selon leurs termes, «tout laissé derrière eux », «tout abandonné » pour «chercher l'aventure », «chercher la vie », «chercher l'argent », «se chercher soi ». S'efforçant d'atténuer les contraintes liées aux systèmes de pouvoir et d'obligation, ils poursuivent des projets plus personnels
[5] et tentent de les réaliser au travers d'une nouvelle émergence commerciale, le plus souvent sans véritable capital. Ceux qui veulent «à tout prix » incarner l'image idéalisée de l'homme ou de la femme d'affaires, misent «le tout pour le tout », s'élancent au «coûte que coûte » vers le succès comme vers l'échec. Serait-il que ces aventuriers n'aient rien à perdre ? Emilie se bat, «je veux gagner la vie. La vie, ça veut dire l'argent, l'amour (...) C'est trouver un nom », un nom, plus personnel encore qu'une renommée. L'engagement de Lucette dans le commerce est une aventure pour «se réaliser ». Selon Lisa, le commerce est un «épanouissement ». Pour Sylvain, c'est «une drogue, qui permet de tenir ». Soya, elle, parle d'un «fortifiant ».

On peut légitimement s'interroger sur la place que l'initiative commerciale occupe dans ces itinéraires, s'interroger sur les projets qu'elle soutient. Si, comme le rappelle Lucette, «le commerce c'est un métier, c'est d'abord pour manger à notre faim ».

4 commentaires:

  1. eh bé ! Quelle est la source de ce long texte ?

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  2. Il y a aussi des infos intéressantes sur wikipédia avec des liens vers des statistiques quyi parlent (taux de diplômés, tranches d'âge, bénéficiaires de la CMUC etc...)

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  3. ouf, trop long pour moi, j'ai pas tout lu. t'en penses quoi de ce quartier ? ça ressemble à Constantine ?

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  4. il est populaire ,autant de commerce ,il ya un champ familial ,je trouve qu'il existe de ressemblances entre lui et les quartiers patrimoniales de l'Algérie qui s'appellent "KOSBA"
    mais non pas dans l'aspect architectural beaucoup plus dans le dynamisme ,amicale des gens .

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